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CA/23-0104

Non fondée Commission d'appel Commission d'Appel Autre décision directeur
AUTRE DECISION DIRECTION - POSSESSION ORDINATEUR - DROIT A L'INSTRUCTION

Sur la recevabilité (rationae materiae) :

L'intimé conteste le refus de la direction de lui permettre de disposer de son ordinateur dans sa cellule.

La Commission d’appel estime que, bien que prise en application d’une circulaire ministérielle, la décision contestée est bien une décision individuelle prise par le directeur envers le plaignant tel que prévu par l’article 148 précité, en ce qu’elle refuse spécifiquement à l’intimé de disposer d’un objet lui appartenant en particulier.

En appliquant la circulaire ministérielle à un cas concret, la direction a pris une décision individuelle qui relève de la compétence de la Commission des plaintes.

Sur la recevabilité (rationae personae) :

Contrairement à ce qu’affirme l’intimé, l’auteur de l’acte est clairement identifié. Il s’agit de Mme A. V. qui remplace Mme V. L., la cheffe d’établissement, absente. La personne est en l’espèce identifiée comme étant Mme A. V., comme écrit en début de document de sorte que l’absence du nom en bas de la signature n’est pas préjudiciable. Par ailleurs, il ressort du dossier soumis à la Commission d’appel que l’intimé a connaissance de la qualité de Mme A. V.

Sur le fond : La direction de la prison d’Ittre a refusé de permettre à l’intimé d’utiliser son ordinateur personnel en cellule, acheté lors de sa détention en France, sur base d’une circulaire ministérielle.

Cette circulaire prévoit qu’à partir du 1er février 2010, il n’est plus possible pour une personne détenue d’acheter un ordinateur. Désormais, les détenus ont la possibilité de louer un ordinateur sur demande.

Les problèmes de sécurité évoqués dans la circulaire ne sont pas étayés.

Il en résulte une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux, en particulier, le droit à l’instruction consacré à l’article 2 du premier protocole additionnel à la CEDH et à l’article 24 de la Constitution.

La Cour européenne des droits de l’Homme a déjà jugé que : « Il convient à cet égard de rappeler que l’importance de l’éducation en prison a été reconnue par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe dans ses recommandations sur l’éducation en prison et dans ses Règles pénitentiaires européennes (…). La Cour réitère que la manière de réglementer les modalités d’accès à ces types de possibilité dans le milieu carcéral relève de la marge d’appréciation de l’État contractant. À cet égard, bien que les considérations de sécurité invoquées par les autorités nationales et par le Gouvernement puissent être considérées comme pertinentes en l’espèce, elle observe que, (…), les juridictions nationales n’ont procédé à aucune analyse détaillée des risques pour la sécurité et qu’elles n’ont pas rempli, d’une part, leur tâche consistant à mettre en balance les différents intérêts en jeu dans la présente affaire et, d’autre part, leur obligation d’empêcher tout abus de la part de l’administration. » .

Par ailleurs, l’article 45 de la loi de principes prévoit que :

« § 1er. Conformément aux règles à définir par le Roi dans l'intérêt de l'ordre et de la sécurité les objets que le détenu porte sur lui lors de son incarcération et les objets qu'il acquiert pendant sa détention sont, selon le cas et sauf dispositions légales contraires, soit laissés en sa possession, soit mis en dépôt contre remise d'un reçu, soit éloignés de la prison à sa demande.
§ 2. Conformément aux règles à définir dans le règlement d'ordre intérieur, le détenu a le droit d'entreposer dans son espace de séjour ou de garder sur lui les objets qui lui appartiennent et dont la détention n'est pas incompatible avec l'ordre et la sécurité. ».

La Commission d’appel rappelle qu’une circulaire ministérielle présente une valeur hiérarchique inférieure à celle de la loi et des normes internationales. Une circulaire ministérielle ne peut, en outre, ajouter à la législation des règles nouvelles . Elle ne peut pas non plus apporter plus de limites aux droits des personnes détenues que la loi elle-même. Comme le mentionne l’intimé, une circulaire ministérielle est un instrument qui émane de l’autorité hiérarchique et qui lui permet d’organiser son administration.

A l’instar de la Commission des plaintes, la Commission d’appel estime qu’elle n’est pas liée par la circulaire ministérielle précitée.

Par ailleurs, le conseil de l’intimé a précisé, par un courriel daté du 6 juin 2023 que la décision querellée a été exécutée par la direction de la prison d’Ittre, que dans le cadre de cette exécution, l’ordinateur litigieux a été contrôlé par le service ICT qui n’y a rien trouvé de problématique et que par ailleurs, l’intimé a marqué son accord pour des contrôles aléatoires de l’ordinateur toutes les deux à trois semaines.

Finalement, la Commission d’appel considère que la direction ne peut se prévaloir d’une insécurité juridique relative à l’application d’une circulaire ministérielle, alors que la loi est claire et sans ambiguïté à cet égard.