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CP36/23-0336

Fondée décision irrecevable manque de clarté Commission des plaintes Disciplinaire
DISCIPLINAIRE - PRINCIPE DE SUBSIDIARITE - TEMOINS

Concernant le premier RAD, à savoir fait d’avoir fumer sur la terrasse, le plaignant explique qu’il a toujours vu fumer les agents sur cette terrasse et déclare même durant son audition que la direction peut se rendre sur place pour y constater les mégots. Il ajoute que cette terrasse est directement reliée à la cuisine dans laquelle il travaillait.
La Commission des plaintes ne voit pas en quoi une sanction disciplinaire était nécessaire. En effet, l’article 122 de la loi de principes a été adopté afin de limiter le recours à la procédure disciplinaire aux situations dans lesquelles le maintien de l’ordre et de la sécurité de l’établissement le justifie de manière impérieuse et qu’aucun autre moyen ne peut être employé pour l’assurer. Dans le cas présent, la direction n'expose pas les motifs qui justifient le recours à la procédure disciplinaire, ni n’indique en quoi l’ordre ou la sécurité le justifiaient de manière impérieuse. Le plaignant n’a d’ailleurs pas d’antécédents disciplinaires et ses évaluations ont toujours été positives avant ces deux rapports, il apparait que le principe de subsidiarité aurait dès lors dû être appliqué par la direction dans le cas d’espèce.

Concernant le second RAD, lequel fait état d’insultes à l’égard d’une agente, la Commission des plaintes constate que les propos, tels que relatés dans le RAD ne peuvent être qualifiés d’injures.
En effet, le fait que le plaignant a demandé à la teamleader si les agents passaient des tests psychologiques ne constitue pas une injure mais un propos déplacé. Il conteste également le reste des propos qu’on lui prête dans le rapport.
A cet égard, le plaignant a demandé à ce que l’agente V. puisse être entendue en tant que témoin. La direction n’a pas fait droit à cette demande et n’a pas motivé sa décision sur ce point.
La Commission d’appel a déjà jugé à plusieurs reprises « qu’une sanction disciplinaire peut être imposée si les faits qui sont portés à la connaissance de la direction forment un faisceau de présomptions qui permettent de constater la réalité des faits et de les imputer au détenu concerné. S’il n’appartient pas à la Commission des plaintes de se substituer dans cette appréciation à la direction, il lui revient de vérifier si, des éléments mis à la disposition de l’autorité disciplinaire, elle pouvait légalement déduire l’existence de ce faisceau de présomptions » .
En effet, si aucune force probante particulière ne peut être légalement reconnue à un rapport disciplinaire contredit par les allégations d’un détenu, ce rapport disciplinaire peut néanmoins participer du faisceau de présomptions nécessaire pour déclarer l’infraction établie s’il est corroboré par d’autres éléments matériels visés par la décision disciplinaire .
Or, en l’espèce, le rapport disciplinaire n’est pas corroboré par d’autres éléments matériels permettant d’imputer les faits à la plaignante. La direction aurait pu entendre la teamleader, en tant que témoin. En outre, comme l’a soulevé le plaignant, le nom de cette agente est repris sur le rapport en tant que témoin mais sans sa signature.
Son audition a pourtant été sollicitée par le plaignant. Or, la direction n’a pas motivé, dans la décision contestée, les raisons pour lesquelles elle ne faisait pas droit à la demande du plaignant concernant ce devoir complémentaire.

Il a pourtant déjà été jugé qu’un rapport rédigé par un agent pénitentiaire est un élément d'information auquel le directeur de la prison peut avoir égard pour prendre sa décision. Toutefois, lorsque le fait reproché, qui est relaté dans le rapport, est contesté par le détenu, le directeur ne peut justifier légalement sa décision en se limitant à se référer au rapport disciplinaire ainsi qu'à l'audition et en exprimant son intime conviction que le fait reproché est établi. Il lui appartient de tenir compte des arguments de défense exprimés par le détenu lors de l'audition disciplinaire. De la sorte, le directeur doit exposer dans sa décision les raisons pour lesquelles les explications apportées par le détenu ne peuvent être retenues et celles pour lesquelles il estime que le rapport disciplinaire suffit à établir les faits reprochés.

Pour l’ensemble des raisons qui précèdent, la plainte est fondée. La sanction du 17 novembre 2023 est annulée. En conséquence, il y a lieu de supprimer cette sanction du registre disciplinaire du plaignant.